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Festival
" les yeux ont des oreilles "
" La Terre " de Dovjenko
Ciné concert avec Martial Romanko
Après Eiseinstein, Murnau, le comique Harold LLoyd, Buster Keaton,
c'est au tour de Dovjenko d'être remis en vie.
C'est une chance, qu'au Comoedia de Sète Jean Pierre Louvel nous
gratifie d'une telle programmation ! C'est avec "La Terre" chef
d'oeuvre en noir et blanc - 1930 - de l'Ukrainien Alexandre Dovjenko,
que nous avons retrouvé, ravis, l'étonnant musicien et chanteur
Martial Romanko. La version complète du film, unique copie en circulation
restaurée en 1971 nous a parue courte !
Ce fut un grand moment que ce concert d'images et de chants dans la langue
de Kiev: pertinent...beau...fort...avec la surprise d'une voix de femme
dans deux brèves apparitions, émouvante et limpide.
Nous restons sous le charme de Romanko, de sa voix, ses musiques improvisées
ou traditionnelles, s'immisçant, s'infiltrant pour nous dans l'intimité
profonde des terres: sillons...fruits... moissons...visages ! Quels acteurs
que ces comédiens qu'affleure le théâtre poussé
à son paroxysme. Les silhouettes... les hommes... les mouvements
des blés sur pied ou en moisson... l'amour...l'infime... l'aigu...
la violence ou la tendresse des regards... tout nous parle dans ce film
muet, même l'enfilade des boeufs, comme on n'en voit plus, un brin
goguenards attendant ainsi que les hommes de l'autre coté de la
route, l'arrivée du premier tracteur "salvateur" qui
sonnera bientôt le glas de leur aliénation à l'homme
et à la terre.
Malgré l'anomalie passionnelle du crime ici, la mort fait encore
partie de la vie et est vécue comme le moteur irréversible
et redoutable de toute cette population villageoise, qui chante en pleurant
le"nouveau monde" à l'enterrement du jeune Vassil assassiné.
Martial Romanko, a su du bout des doigts et de ses trois instruments traduire
avec légèreté...force... ou humour...cette riche
palette d'émotions et surtout la sérénité
pluvieuse de la fin du film, caressant en gros plans inoubliables, les
pommes du verger et l'apaisement de cette nature qu'aucun théâtre
de la vie ne semble jamais pouvoir ébranler.
Alexandre le Guillon
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